Lyon-Turin : les opposants à la ligne ferroviaire grande vitesse se rassemblent malgré l’interdiction

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Des manifestants traversent l’Arc pour bloquer l’autoroute A43 lors d’une manifestation contre la construction de la ligne ferroviaire à grande vitesse Lyon-Turin, près de La Chapelle en Savoie, le 17 juin 2023. Des manifestants traversent l’Arc pour bloquer l’autoroute A43 lors d’une manifestation contre la construction de la ligne ferroviaire à grande vitesse Lyon-Turin, près de La Chapelle en Savoie, le 17 juin 2023.

La mobilisation aura été marquée par de brèves échauffourées avec les forces de l’ordre et une courte occupation de l’autoroute A43. Des opposants à la ligne ferroviaire Lyon-Turin, présents toute l’après-midi sur une route de la vallée de la Maurienne près de Saint-Rémy-de-Maurienne, en Savoie, se sont repliés sur leur camp de base au terme de leur manifestation, samedi 17 juin en fin d’après-midi.

Alors que le cortège commençait à refluer, quelques dizaines de militants, bloqués sur une route départementale, sous un soleil de plomb, faute d’avoir réussi à négocier un parcours avec les autorités, ont traversé à pied la rivière Arc pour rejoindre l’autoroute située de l’autre côté, se tenant par la main pour résister au fort courant. Les forces de l’ordre sont rapidement intervenues pour les chasser de l’A43, faisant usage de gaz lacrymogènes, tandis que le gros des manifestants les huait depuis l’autre rive.

Ce n’est qu’après cet incident que les opposants ont graduellement fait demi-tour pour rejoindre leur camp de base situé hors de la zone d’interdiction, dans la commune voisine de La Chapelle, laissant derrière eux des barricades improvisées en flammes.

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Entre 3 000 et 4 000 militants mobilisés

L’arrêté d’interdiction pris par la préfecture de Savoie en amont de la mobilisation avait été confirmé vendredi pour des raisons de sécurité par le tribunal administratif de Grenoble, lors du rejet d’une requête déposée par les Verts (Europe Ecologie-Les Verts, EELV), Attac Savoie et Vivre et agir en Maurienne.

Au total, entre 3 000 militants, dont « 300 éléments radicaux », selon la préfecture, et plus de 4 000, selon les organisateurs, ont tout de même défilé samedi à l’appel d’une dizaine d’organisations, dont Les Soulèvements de la Terre, menacée de dissolution par le ministère de l’intérieur, et les No TAV italiens, pour protester contre ce chantier jugé « pharaonique » et « néfaste » pour l’environnement, la biodiversité et les ressources en eau.

« 96 ressortissants étrangers, connus des services, ont été refoulés à la frontière. Plus de 400 objets dangereux ont été saisis lors des contrôles en amont », a résumé dans un tweet le ministre de l’intérieur Gérald Darmanin en fin de journée, signalant « 12 gendarmes blessés ». Les organisateurs évoquent aussi « plusieurs blessés » dans leurs rangs.

« La sécurité des personnes et des biens, qui était notre objectif principal, a été globalement assurée », a quant à lui déclaré le préfet de Savoie François Ravier, au cours d’un point de presse en fin de journée.

Deux mille policiers et gendarmes s’étaient déployés dans cette vallée frontalière de l’Italie, célèbre pour ses stations de ski. Installés dans des prés, sur un terrain prêté par la commune de La Chapelle, les campeurs, dont beaucoup de jeunes, se sont réveillés samedi sous la surveillance d’un hélicoptère de la gendarmerie.

Echauffourées et blocage des manifestants italiens

E milieu d’après-midi, présent dans le cortège, un groupe d’élus écologistes et « insoumis » a essayé de négocier avec les autorités pour « aller un peu plus loin » dans leur parcours, tandis que les manifestants patientaient sous un soleil torride sur une petite route à proximité de Saint-Rémy-de-Maurienne, à une trentaine de kilomètres de la frontière italienne, sans que leur initiative ne trouve succès. Les premières échauffourées ont alors éclaté, menées par un « un groupe de radicaux », formé par environ 300 personnes et qui s’est ensuite « constitué en blackbloc », selon le détail avancé par le préfet en fin de journée.

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« A 15 heures, alors que les manifestants étaient empêchés de progresser vers la vallée de la Maurienne, les premières grenades [ont été] tirées pour répondre aux jets de pierres », avait témoigné notre journaliste Rémi Barroux en milieu d’après-midi. Des manifestants ont aussi brièvement envahi la voie ferrée à proximité, stoppant temporairement la circulation des trains en début d’après-midi, selon la SNCF.

Du côté italien du tunnel, notre journaliste Richard Schittly constatait quant à lui, vers 16 heures, que « 250 personnes et quatre bus [étaient] bloqués depuis 10 heures ce matin » et ainsi empêchés, par la police française, d’aller manifester de l’autre côté de la frontière, avant qu’ils ne fassent demi-tour vers Turin. Le préfet a précisé en fin de journée qu’il s’agissait de « cinq bus de militants italiens – soit environ 280 passagers ».

« Un moment historique dans cette vallée »

« Nous sommes tous des écoterroristes », criaient certains manifestants lors du rassemblement, tandis que des troupeaux de vaches regardaient passer le défilé coloré par de nombreuses tenues bleues – le dress code de la manifestation – avec des drapeaux et des banderoles « La montagne se soulève ». Certains étaient cagoulés de noir, d’autres portaient des casques, des raquettes ou des parapluies, afin de se protéger des drones, des fumigènes ou des assauts des forces de l’ordre.

« Aujourd’hui c’est un moment historique dans cette vallée (…), il y a énormément de monde venu de toute la France, de l’Italie, voire même de Suisse », s’est réjoui Philippe Delhomme, ancien élu local qui milite depuis des années au sein de l’association Vivre et agir en Maurienne.

« On est très content de cette mobilisation qui a été un pari difficile à tenir (…), nous ne nous laisserons pas intimider (…), c’est ici qu’il y a l’avenir et pas dans un projet mortifère et complètement dépassé par l’histoire », a souligné Lorenzo, du mouvement italien No TAV, mobilisé depuis des années contre le projet piloté par Bruxelles.

Des manifestants se rassemblent contre la construction d’une ligne ferroviaire à grande vitesse entre Lyon et Turin, à La Chapelle, dans la vallée de la Maurienne (Savoie), le 17 juin 2023. Des manifestants se rassemblent contre la construction d’une ligne ferroviaire à grande vitesse entre Lyon et Turin, à La Chapelle, dans la vallée de la Maurienne (Savoie), le 17 juin 2023.

Du côté des élus étaient notamment présents le maire EELV de Grenoble, Eric Piolle, la présidente des députés « insoumis », Mathilde Panot, ou encore la députée (EELV) de l’Isère Cyrielle Chatelain et la conseillère régionale Fabienne Grebert (EELV), présidente du groupe écologiste en Auvergne-Rhône-Alpes.

« La manifestation a été interdite sur un périmètre, nous irons manifester ailleurs », a lancé dans un tweet le maire de Grenoble, tandis que la cheffe de file des députés La France insoumise a déclaré sur place : « Notre nombre est un signal politique (…) il y a quelques jours, les pro- Lyon-Turin se sont réunis, ils étaient seulement cent, [nous, les opposants] nous sommes des milliers à dire que nous voulons l’arrêt de ce projet inutile. »

« Il n’y avait pas de raisons de ne pas autoriser cette manifestation dès lors qu’elle est dans un esprit non violent, et nous, on prônera toujours des logiques de non-violence », a ajouté Mme Grebert.

Coût évalué à plus de 26 milliards d’euros

« C’est quand même assez scandaleux, drôle que l’Etat et le gouvernement décident de s’attaquer à un mouvement, à des militants écologistes, à des paysans, à des syndicats alors qu’aujourd’hui il faudrait vraiment s’attaquer à toutes les industries, à tous ceux qui détruisent le vivant, qui sont en train de nous faire crever de chaud », a souligné Pina, la porte-parole des Soulèvements de la Terre, lors des prises de parole.

Soutenue par l’Union européenne, la nouvelle ligne doit à terme relier Lyon et Turin, avec 70 % des voies en France et 30 % en Italie, et un tunnel de 57,5 kilomètres traversant les Alpes entre Saint-Jean-de-Maurienne et Suse. Coût évalué : plus de 26 milliards d’euros.

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Les partisans du projet mettent en avant la nécessité de réduire le flux de poids lourds, en constante augmentation, pour limiter les émissions de gaz à effet de serre. Ils invoquent aussi le développement économique que permettra selon eux une ligne ferroviaire plus rapide.

Les opposants, eux, font valoir qu’une ligne existe déjà et que le fret ferroviaire n’a cessé de baisser ces dernières années. Ils dénoncent aussi les impacts écologiques de ce chantier « ferroviaire titanesque, impliquant le forage de 260 kilomètres de galeries à travers les massifs alpins ». Selon eux, les travaux ont déjà tari plusieurs sources et captages dans la vallée.

Le Monde avec AFP

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