Hervé Gerbi, le président du CRIF de Grenoble, s’est rendu en début de semaine en Israël, en compagnie du président national du conseil représentatif des institutions juives de France et des représentants de la communauté de Marseille et de Lyon. Un voyage de 36H qui a permis à l’avocat de rencontrer des familles d’otages et de visiter Kfar Aza, un des kibboutz attaqué par le Hamas le 7 octobre dernier. Objectif : témoigner de ce qu’il a vu là-bas et mobiliser l’opinion publique pour éviter toute forme de révisionnisme.
France Bleu Isère : Pourquoi ce voyage ?
Hervé Gerbi : C’est aussi un peu l’avocat que vous avez devant vous, celui qui est attaché aux droits de l’homme et au respect de la vie. L’objectif de ce voyage, c’est la solidarité avec Israël, avec les Israéliens. Leur montrer que la communauté juive française, qui est la deuxième communauté de la diaspora au monde, est présente à leurs côtés. Que ce qui leur arrive a des répercussions sur l’ensemble de la communauté juive et par delà dans le monde et que nous sommes sensibles à ça. Et puis, nous venons pour témoigner de ce que nous avons vu. Et nous venons pour mobiliser, pour mobiliser l’opinion publique sur la réalité historique de ce qui s’est passé. Qu’il n’y ait pas de confusion sur la situation telle qu’elle se trouve aujourd’hui. Bien sûr, qu’une vie vaut une autre vie, un mort, un autre mort, que la vie d’un enfant vaut celle d’un autre enfant, quelle que soit la frontière. Mais la problématique n’est pas là. La problématique est de regarder du côté de ceux qui frappent et de ceux qui ont frappé. Et on ne peut pas mettre sur le même plan un régime qui est un régime démocratique, peut-être imparfait, mais un État démocratique, avec une armée qui est une armée régulière, qui aujourd’hui doit répliquer parce que sa riposte est légitime. Personne ne peut admettre autant de morts sur son propre sol sans répliquer et qui le fait avec les armes de la guerre, en essayant de limiter au maximum les pertes de vies humaines innocentes. On ne peut pas mettre sur le même plan Israël tel que je viens de le décrire, et un groupe qui est un groupe terroriste. Un groupe qui rentre dans un territoire et qui va chercher, homme par homme, femme par femme, enfant par enfant. Et qui va détruire leur vie. Les uns après les autres, dans des atrocités terribles d’une monstruosité incroyable que nous avons vues, que nous avons entendues, qui filme ces atrocités pour que le monde, car c’est eux qui filment, pour que le monde sache comment il sème la terreur en Israël. On ne peut pas mettre sur le même plan le Hamas et l’Etat israélien et c’est cela aujourd’hui que l’opinion publique doit comprendre. Il y a la bête immonde d’un côté et qui menace non seulement l’existence d’Israël, mais qui menace aussi notre monde, notre civilisation, nos valeurs. Et il y a d’un autre côté le dernier rempart d’une démocratie occidentale au Moyen-Orient.
Quels sont les temps forts, les moments qui vous ont marqué ou ému durant ces 36 heures en Israël ?
Hervé Gerbi : D’abord c’est un pays qui est méconnaissable. Tel Aviv, la ville qui ne dort jamais et qui est une ville aujourd’hui au ralenti, sans aucune activité. Et tous les hôtels sont réquisitionnés pour accueillir des familles de réfugiés dans leur propre pays, des femmes, des enfants dans des poussettes. Certains n’ont plus où aller, n’ont plus d’emploi, n’ont parfois plus de famille parce que leurs proches ont été tués. Il y a aussi l’odeur pestilentielle de la mort quand on arrive dans cette grande morgue militaire de Shura. Et de tous ces casiers avec ces corps emballés en cours d’identification et au moment où on y est, il y a ce petit corps qui arrive et qui va être identifié. Et face à cette mort, c’est aussi le regard de ces jeunes soldats, des femmes, des hommes, qui savent qu’ils ne font plus désormais qu’une seule et même nation face à une grande adversité et qui sont unis dans cette adversité. Voilà effectivement ce qui m’a marqué, cette force dans ces regards. Le temps de la sidération est en train de passer et le temps du rassemblement, de l’énergie, est là chez tous ceux qui se sont mobilisés. Ce voyage, il fallait le faire. Il fallait être auprès des Israéliens. Il fallait que la communauté juive soit auprès des Israéliens. Et je suis très content d’avoir porté la voix de la communauté juive de Grenoble, de notre département auprès de ces familles israéliennes, auprès des soldats israéliens. C’était important pour eux, c’était important pour nous.
Redoutez-vous que les actes antisémites se multiplient en France ?
Hervé Gerbi : Oui, nous le redoutons parce que ces actes antisémites sont le fruit d’une confusion qui est entretenue, d’une réécriture de l’Histoire. Nous assistons à un révisionnisme incroyable, après ce qui s’est passé le 7 octobre, sur lequel aujourd’hui certains essaient de construire un antisémitisme nouveau et a fortiori facilitent, par leur discours, par leur propagande, le passage à l’acte antisémite. Donc c’est notre crainte. Vous le savez, les autorités sont très mobilisées pour que la sécurité des bâtiments, des écoles, des personnes de la communauté juive soit assurée.
Après le 7 octobre, le maire de Grenoble a souhaité relancer le jumelage avec Rehovot, dirigée par le Likoud. Le collectif Isère Palestine lui a écrit pour lui demander d’y renoncer. Quelle est votre position par rapport à ça?
Hervé Gerbi : Je tiens absolument à souligner le courage, la lucidité du maire de Grenoble lorsqu’il relance à ce moment précis de l’histoire d’Israël ce jumelage avec Rehovot. C’est un acte de fraternité qui est concret et qui est projectif. On se projette. Alors nous l’attendions. Nous l’avions réclamé non pas pour qu’il efface un autre jumelage qui est celui de Bethléem, mais pour qu’il équilibre les choses. Et parce que nous considérons que de Bethléem à Rehovot, dans chacune de ces villes, il y a des citoyens et des citoyennes qui sont engagés pour la paix, qui demain vivront côte à côte en paix, qui demain construiront côte à côte la paix. Et c’est cela qu’il faut favoriser. C’est cette émergence de citoyens et de citoyennes engagés pour la paix qu’il faut encourager. Donc, je suis très heureux que ce rééquilibrage ait été fait. Nous n’avons jamais demandé la fin du jumelage de Grenoble avec Bethléem. Et pourtant, sur les hauteurs de Bethléem, vous avez des installations du Hamas ou d’un autre mouvement terroriste, le FPLP. Pour autant, nous ne confondons pas la présence du Hamas à Bethléem avec les citoyens qui y vivent et qui partagent avec la ville de Grenoble des actions sociales, culturelles. Ils sont des porteurs de paix. Et bien, c’est la même chose à Rehovot. On peut ne pas partager la politique de la mairie de Rehovot mais constater que dans Rehovot, il y a des mouvements de paix. Il y a des citoyens porteurs de paix.
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